La viscosité
Introduction à la viscosité et sa mesure
Cette introduction à la viscosité vous présentera ce qu'est la viscosité (définition, unités, etc...), ses caractéristique (définition, unités, etc…), les
différents types de fluides existants, les principales technologies existantes afin de caractériser un fluide, ainsi qu'un guide de choix vous indiquant quel instrument de mesure choisir et quel mobile utiliser en fonction de votre application.
Vous y découvrirez également quels instruments utiliser pour analyser vos produits non-coulants.
Présentation de la viscosité
La viscosité est une des propriétés permettant de caractériser un fluide, mais il en existe d’autres, telles que la plasticité ou l’élasticité. Toutes ces disciplines sont rassemblées sous la même science appelée rhéologie, qui est l’étude de la déformation et de l’écoulement de la matière.
La viscosité caractérise la friction à l’intérieur d’un fluide, due à l’attraction moléculaire, ce qui fait que le fluide résiste à son propre écoulement. Physiquement, la viscosité est la mesure du frottement des couches de fluides les unes sur les autres. Plus ce frottement est important, plus le fluide sera visqueux, et ainsi, plus il faudra déployer de force pour déplacer le fluide. Et inversement, si ce frottement est moins important, il s’écoulera plus facilement, et sera moins visqueux.
L’unité de mesure de la viscosité est la Poise (P ou Po). Elle peut être aussi exprimée par son équivalant, le Pascal-seconde (Pa.s), avec 1 Pa.s équivalant à 10 P, ou pour les liquides de faible viscosité, 1 mPa.s (milliPascal-seconde) équivalant à 1 cP (centiPoise). Ces unités sont celle de la viscosité dynamique, elle est désignée par la lettre grecque µ (« mu ») ou η (« éta »). Pour se figurer concrètement la viscosité, voici des ordres de grandeurs en fonction de matériaux connus :
Matériaux | Viscosité dynamique (en mPa.s, à 20°C, à 1 atm) |
Eau | 1 |
Huile d'olive | 84 |
Miel | 10*103 |
Beurre de cacahuètes | 250*105 |
Poix | 2.3*1011 |
Pourquoi mesurer la viscosité ?
La connaissance de la viscosité d'un matériau est utile pour une multitude d'applications, telles que le contrôle de la qualité final d'un produit (comme les peintures ou les huiles), la connaissance de l'avancement de réactions physico-chiliques ou encore pour dimensionner des équipements
Un peu de théorie
Mathématiquement, la viscosité dynamique est égale à la contrainte de cisaillement (τ ou « tau »), divisée par le taux de cisaillement.
La contrainte de cisaillement représente la force (par unité de surface) appliquée sur le fluide, pour que les couches de fluide se déplacent les unes sur les autres, donc pour cisailler le fluide (Figure 1).
Le taux de cisaillement représente le déplacement en mètre par seconde (m/s) des couches de fluides les unes sur le autres.
Cette description de l’écoulement d’un fluide est celle d’Isaac Newton. Dans cette description, la contrainte et le taux de cisaillement sont proportionnels et donc la viscosité est constante. Nous verrons, par la suite, que dans la majorité des cas, la viscosité est plus complexe que ce que Newton pensait, et que le cisaillement est un paramètre très important dans la mesure de la viscosité.
µ=τ/pente avec τ = F/A et A la surface sur laquelle la force F est appliquée.
Schéma de l'écoulement d’un fluide selon Newton
Quelques termes importants
FLUIDES NEWTONIENS
Les fluides exhibant le type de comportement d’écoulement décrit plus haut (Figure 1), sont appelés fluides newtoniens. Cette description est valable pour quelques fluides comme l’eau ou l’alcool. Ces fluides ont une viscosité dynamique constante (µ), peu importe le cisaillement auquel ils sont exposés.
FLUIDES NON-NEWTONIENS
Rhéo-épaississant et rhéo-fluidifiant
Cependant, une grande partie des fluides sont dits non-newtoniens (comme la peinture ou le ketchup par exemple). En effet, quand on essaye d’appliquer de la peinture sur un mur, elle s’écoule peu toute seule (elle est donc visqueuse), mais quand nous y appliquons un cisaillement que l’on appellera S, elle devient plus liquide, facile à appliquer et se fluidifie.
Ce type de fluide sont appelés rhéo-fluidifiants, Ceux qui au contraire deviennent plus visqueux quand ils sont cisaillés, sont dits rhéo-épaississants.
Pseudoplastique
Il existe également un autre type de fluide non-newtonien, les pseudoplastiques.
Leur comportement est similaire aux fluides rhéo-fluidifiants et rhéo-épaississants, sauf qu’ils exhibent un « seuil d’écoulement », un cisaillement en dessous duquel, le matériau se comporte comme un solide, et au-delà duquel le fluide se met à exhiber des caractéristiques rhéo-épaississantes ou rhéo-fluidifiantes. Le ketchup est un exemple de fluide pseudoplastique, il devient liquide qu’à partir du moment où on l’agite.
Thixotropie et rhéopexie
Par ailleurs, un fluide peut voir sa viscosité varier avec le temps (sous un cisaillement constant), ces fluides sont appelés thixotropes si leur viscosité diminue avec le temps, et rhéopexes si leur viscosité augmente avec le temps.
Comment mesurer la viscosité et d'autres caractérisitques d'un fluide ?
Il existe plusieurs appareils pour caractériser un fluide.
Le viscosimètre permet de déterminer uniquement la viscosité d’un fluide sous certaines conditions (newtonien, fluide pouvant être défini par une seule valeur de viscosité), en raison de sa plage de cisaillement limitée.
Un rhéomètre, quant à lui, permet de caractériser tous les fluides et ce plus en détails (propriétés rhéologiques), en raison de sa plage de cisaillement plus élevée que celle d’un viscosimètre.
Voici un tableau récapitulatif des principales différences entre les deux types d’appareils :
Caractéristiques | Viscosimètre (seul) | Rhéomètre (seul) |
Plage de mesure | Faibles | Élevée |
Type de fluides analysables | Newtoniens | Tous les fluides |
Principales propriétés analysables | Viscosité | Viscosité, seuil découlement, thixotropie |
Il est important de noter que ce tableau est valable pour les viscosimètres ou les rhéomètres seuls (sans le logiciel associé).
En effet, il est possible de rendre un appareil plus fonctionnel en le pilotant à l’aide d’un ordinateur. Dans ce cas, un viscosimètre permet de « toucher du doigt » la rhéologie, et ainsi déterminer le seuil d’écoulement d’un fluide, ou encore étudier la thixotropie d’un produit par exemple.
Pour analyser un produit, on utilise communément un viscosimètre ou rhéomètre rotatif.
Ces instruments effectuent des mesures sur un fluide en y immergeant un mobile ou « spindle ».
Il existe deux configurations différentes : les systèmes à ressort et ceux à encodeur numérique.
Système à ressort
Le système à ressort est le premier à avoir été commercialisé (Figure 4).
L’axe principal est mis en rotation par un moteur synchrone, ce même axe est lié à un ressort en forme de spirale, qui est lié au mobile (rotor).
Ainsi sous l’effet du fluide sur le mobile, le ressort se déformera plus (pour un fluide très visqueux) ou moins (pour un fluide peu visqueux).
Et donc, connaissant la déformation du ressort, on peut remonter à la viscosité du fluide testé, et à d’autres caractéristiques.
Schéma d’un système à ressort
Système à encodeur numérique
Le système à encodeur numérique, quant à lui, tire parti du courant nécessaire pour mettre en rotation le mobile (plongé dans l’échantillon).
En effet, la viscosité du fluide sera proportionnelle au courant et à la vitesse de rotation du mobile dans le fluide. Un des avantages de ce genre de viscosimètre est qu’un appareil permet d’effectuer des mesures sur une large gamme de fluides (de peu à très visqueux), alors qu’un système à ressort doit être choisit en fonction du fluide étudié.
Avec les viscosimètres L (ou LV) pour les faibles viscosités (encres, huiles et solvants par exemple).
Les viscosimètres R (ou RV) pour les viscosités moyennes (crèmes, peintures ou quelques aliments par exemple), et les viscosimètres H (ou HV) pour les fortes viscosités (gels, beurre de cacahuète ou asphalte par exemple).
Schéma d’un système à encodeur numérique
Paramètres à prendre en compte lors de l'analyse d'un échantillon
La viscosité d’un produit est souvent indiquée pour une certaine température, car la viscosité varie quand ce paramètre est modifié.
La viscosité d’un produit peut également être affectée par d’autres paramètres comme la durée de mesure, le matériel de mesure (mobile, récipient utilisé, etc…), la pression environnante, l’historique du produit ou encore le cisaillement subit par le produit (pour les fluides non-newtoniens).
TEMPÉRATURE
La température est un des principaux paramètres affectant la viscosité d’un produit.
L’élévation de la température a pour effet de dilater un fluide, et donc de lui permettre de s’écouler plus facilement, due à la friction moins importante entre les molécules qui le compose.
Les viscosimètres et rhéomètres proposés par Jeulin, possèdent tous une solution afin de réguler votre produit en température lors de vos analyses.
TAUX DE CISAILLEMENT
Comme discuté en partie 5, certains fluides (les non-newtoniens) voient leur viscosité varier en fonction du cisaillement qui leur est imposé.
Ainsi, lorsqu’un produit est analysé, il est impératif de le soumettre à des cisaillements différents, afin de voir son comportement rhéologique dans différentes conditions. Ceci est vrai pour les peintures, les produits cosmétiques ou encore le sang.
MATÉRIEL DE MESURE
Le matériel de mesure comme le mobile tournant dans le liquide analysé, ou le récipient dans lequel le liquide est analysé, sont également des variables très importantes lorsque l’on mesure la viscosité d’un produit.
Ces variables peuvent à la fois avoir un impact sur la reproductibilité des mesures, mais aussi sur la justesse des mesures de viscosité en elles-mêmes.
En effet, l’échantillon analysé interagira différemment avec un mobile de faibles dimensions, et un mobile de dimensions plus élevées, donc la mesure de viscosité ne sera pas la même entre les deux mobiles.
De plus, le mobile doit être immergé dans l’échantillon jusqu’au milieu du repère inscrit sur son axe, afin d’obtenir des mesures correctes.
Il faut également que le récipient dans lequel est versé l’échantillon, et plongé le mobile, soit d’une certaine dimension.
Par exemple, pour les mobiles standards L (1 à 4) et R (1 à 7), il est préconisé d’utiliser un bécher de 600 mL, de 83 mm de diamètre ou plus.
TEMPS DE MESURE
Comme discuté partie 4, certains fluides voient leur viscosité varier avec le temps (fluides thixotropiques et rhéopexes). Ainsi, le temps d’analyse d’un produit doit être pris en compte dans la mesure de sa viscosité.
HISTORIQUE DU PRODUIT
Des aspects comme l’âge du produit, sa préparation ou ses conditions de stockage doivent être pris en compte pour la mesure de sa viscosité.
En effet, la viscosité d’un produit hétérogène peut varier significativement s’il a été agité ou cisaillé avant d’être analysé.
PRESSION
Dans une moindre mesure pour les fluides que pour les gaz, la pression autour d’un fluide peut avoir un impact sur sa viscosité.
En effet, la pression comprime les fluides et donc augmente la proximité entre les molécules et donc leur friction quand le fluide est cisaillé.
Cela est plus vrai pour les mélanges de phase (solide, liquide et air), qui lorsqu’ils sont soumis à une forte pression, se voient comprimés à cause de la présence d’air en leur sein.
Comment bien choisir son instrument et ses mobiles en fonction de l'application ?
En fonction du matériau et des propriétés rhéologiques que l’on souhaite étudier, le choix du système, celui des mobiles et de ses accessoires varie.
Voici un schéma explicatif pour comprendre quel système, vitesse de rotation et taille de mobile choisir en fonction de la viscosité de votre fluide.
Choix de la géométrie du mobile
Le tableau ci-dessous vous permet de trouver le bon appareil, la bonne vitesse, ainsi que la taille optimale de mobile quand vous désirer effectuer des mesures rhéologiques, et que vous avez déjà sélectionné votre mobile. Cependant, il existe différents types de mobiles destinés à des applications précisent.
Voici les principaux mobiles à votre disposition, ainsi que leurs domaines d’utilisation.
Mobiles standards selon la norme ASTM/ISO2555, pour la détermination des taux et contraintes de cisaillement, ainsi que de la viscosité, pour la plupart des applications impliquant des fluides non-newtoniens, comme des peintures.
Mobiles normalisés DIN/ISO3219, particulièrement adaptés pour des produits homogènes d’aspect liquide avec ou sans particules. Ces systèmes permettent de fixer le gradient de cisaillement pour effectuer des mesures de viscosité ou de tracer des courbes pour l’étude du comportement d’écoulement, le seuil d’écoulement ou la thixotropie d’un fluide.
Il existe également des appareils appelés gélomètres (ou gel timers) permettant de quantifier, dans différentes configurations, le temps nécessaire à un produit avant que celui-ci ne se gélifie.
Le temps de gélification est déterminé en chronométrant le temps que mets un produit à opposer un certain couple sur une tige immergée dans ce dernier. Cet appareil est donc similaire à un viscosimètre, mais spécialement conçu pour déterminer le temps de gélification d’un produit.
Accessoires pour étendre les fonctionnalités de votre système
Vous pouvez rendre votre système plus polyvalent en y ajoutant des accessoires.
Il est possible d'ajouter une unité de thermostatisation à votre système afin de réguler la température de votre produit pendant son analyse, pour contrôler au mieux l'environnement de mesure, la température étant un paramètre pouvant affecter significativement vos mesures.
Par ailleurs, la plupart des systèmes peuvent être contrôlés par ordinateur. Ainsi, il est possible d'étendre ses fonctionnalités.
En effet, il est possible, à partir d'un viscosimètre pouvant effectuer seulement de simples mesures de viscosités, de l'utiliser pour tracer des courbes d'écoulement, obtenir le seuil d'écoulement, ou encore de faire des mesures thixotropiques sur un produit.
Alternatives pour l'analyse de vos produits non-coulants
Certains produits ne peuvent être analysés avec un viscosimètre ou un rhéomètre, comme du beurre (dur) ou du rouge à lèvre par exemple.
Il existe donc également un appareil spécialement conçu pour analyser ce genre de produits, appelé analyseur de texture ou texturomètre. Cet appareil permet de caractériser un produit en le comprimant, en l'étendant, en le coupant, en le pliant ou en le cisaillant. Ce système permet ainsi de mesurer des propriétés physiques telles que la consistance, l'élasticité, la dureté, la fluidité ou la force d'adhésion. Il peut être associé à une large gamme de sondes en fonction du type de produit analysé.